Les litiges transfrontaliers dans le cadre de la médiation de la consommation et la question des professionnels d’Etats tiers à l’UE


Un litige entre un consommateur résidant dans un Etat membre de l’Union Européenne et une société établie en dehors de l’UE, mais dirigeant ses activités vers des consommateurs en France à travers la vente en ligne, peut-il être résolu par la médiation de la consommation ?


En l’état actuel, l’obligation de désigner un médiateur de la consommation s’applique uniquement aux professionnels dont le lieu d’établissement se situe au sein de l’Union européenne.


L’article L. 611-1, 2° du Code de la consommation définit le litige transfrontalier comme « un litige de nature contractuelle entre un consommateur et un professionnel portant sur l’exécution d’un contrat de vente ou de fourniture de services, lorsqu’au moment de sa conclusion le consommateur réside dans un Etat membre autre que celui du lieu d’établissement du professionnel ».


Une question régulièrement posée est celle de savoir si un professionnel d’un pays tiers à l’UE peut désigner un médiateur de la consommation, bien qu’il n’en ait pas l’obligation ? Il est en effet possible pour un professionnel dont le lieu d’établissement se situe en dehors de l’Union européenne, qui le souhaite, de signer une convention avec un médiateur de la consommation en France. En signant la convention, qui renvoie aux articles sur le dispositif de la médiation de la consommation dans le Code de la consommation, le professionnel se soumet volontairement aux règles précitées de ce code.


Avec la proposition de modification de la directive du 21 mai 2013 relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation, la définition du litige transfrontalier connaîtra une évolution, afin d’adapter le champ d’application de la médiation de la consommation aux types d’achats que font les consommateurs aujourd’hui et aux litiges qui peuvent en naître. En effet, un grand nombre d’achats s’effectue via la vente en ligne avec des sites de sociétés établies en dehors de l’Union Européenne.


Ainsi, la Commission Européenne prévoit de définir le litige transfrontalier comme « un litige entre un consommateur et un professionnel, relatif aux obligations contractuelles et/ou aux droits des consommateurs prévus par la législation de l’Union visée à l’article 2, paragraphe 1, lorsque le consommateur réside dans un Etat membre autre que celui du lieu d’établissement du professionnel ou lorsque le consommateur réside dans un Etat membre et que le lieu d’établissement du professionnel est situé en dehors de l’Union ».


Par un avis rendu le 29 janvier 2024, la Commission d’évaluation et de contrôle de la médiation de la consommation (CECMC) se montre favorable à cet élargissement géographique. En effet, cette extension permettrait d’encadrer l’augmentation des ventes et prestations de service en ligne conclues auprès de professionnels étrangers mais également d’éviter toute inégalité de concurrence entre eux en fonction de leur lieu d’établissement. Néanmoins, la CECMC précise que cette extension ne doit pas aboutir à dégrader le droit au recours effectif du consommateur européen à un dispositif de médiation ainsi que son niveau de protection assuré jusqu’alors par le droit en vigueur. Ainsi, la loi nationale issue de la transposition de la directive de 2013 devrait pouvoir être stipulée dans tous les contrats conclus avec les professionnels de pays tiers dès lors qu’elle est plus favorable que la loi applicable dans ces pays sauf si ces derniers en apportent la preuve contraire.


La proposition de modification de la directive apporte ainsi une extension attendue et nécessaire du champ d’application géographique du dispositif de règlement extrajudiciaire des litiges de consommation.


Emelie Lernas

Juriste – Pôle Médiation de la consommation

CMAP


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