La Cour de cassation a dans un arrêt récent considéré que le principe d’égalité entre les parties dans la constitution du tribunal arbitral avait été respecté, dès lors que toutes les parties se trouvaient privées du droit de choisir leur arbitre(Civ. 1re, 9 nov. 2022, Vidatel, n° 21-17.203).
Dans cette affaire, un différend est né du pacte d’actionnaires conclu entre les sociétés Vidatel, PT Ventures, Mercury et Geni. Le contrat comportait une clause d’arbitrage par un tribunal siégeant à Paris, sous l’égide de la Chambre de commerce internationale (CCI), et composé de quatre arbitres désignés par chacune des parties et d’un président choisi par les arbitres et, à défaut d’accord entre eux, par l’institution d’arbitrage.
PT Ventures a initié une procédure d’arbitrage, alléguant avoir été évincée de la gestion de la société Unitel en violation du pacte d’actionnaires. Dans sa requête d’arbitrage, elle a demandé que le tribunal soit composé de seulement trois arbitres, un nommé par elle-même, et l’autre conjointement par les trois autres sociétés, pour respecter le principe de l’égalité des parties, compte tenu des intérêts convergents des défenderesses. PT Ventures a ensuite procédé à la désignation d’un arbitre sous la condition précitée. Cependant, chacune des trois autres parties ont désigné un arbitre et les quatre arbitres ont accepté leur mission.
La Cour d’arbitrage de la CCI a vainement invité les parties à s’accorder sur un nouveau mode de désignation, puis a nommé l’intégralité des arbitres du tribunal arbitral.
La sentence rendue dans l’arbitrage a fait l’objet d’un recours en annulation formé par la société Vidatel. Suite au rejet de son recours, Vidatel s’est pourvu en cassation.
La Cour de cassation a fait référence à l’article 1453 du Code de procédure civile, ainsi qu’à l’article 12(8) du règlement d’arbitrage de la CCI auquel renvoyait la clause compromissoire.
Du fait de la condition posée par PT Ventures, et que cette condition n’a pas été acceptée par les trois autres sociétés, la Cour de cassation a confirmé « qu’il existait un désaccord sur les modalités de constitution du tribunal arbitral, lequel justifiait que le centre d’arbitrage désignât lui-même l’intégralité des membres du tribunal arbitral, de sorte que, toutes les parties se trouvant privées du droit de choisir leur arbitre, l’égalité entre elles se trouvait préservée. »
Nous retiendrons de cette décision, d’une part, l’interprétation par la Cour de la mise en œuvre du principe d’égalité entre les parties, et d’autre part, la caractérisation du désaccord par la condition posée par l’une des parties.
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Emelie Lernäs
Juriste – Responsable du Pôle Médiation de la Consommation
CMAP